Interview – S.E. Mr Michael Wimmer ambassadeur de Belgique en Côte d'Ivoire

0
4648

Monsieur l’ambassadeur, vous êtes en fonction depuis près d’un an et demi. Quel regard portez-vous sur les relations bilatérales entre la Belgique et la Côte d’Ivoire ?

À mon arrivée à Abidjan, j’ai très rapidement été frappé par l’intensité des échanges entre la Belgique et la Côte d’Ivoire. Nous nous inscrivons dans une relation solide et de longue date : cette année marque le 60ème anniversaire des relations diplomatiques entre nos deux pays. La Chambre de Commerce, rebaptisée BELUCI en 2019, qui regroupe plus de 100 sociétés et s’est récemment ouverte aux entreprises luxembourgeoises ainsi qu’aux sociétés qui opèrent directement depuis la Belgique, est également le témoignage d’un engagement qui s’inscrit dans la durée. Il en va de même pour la CBL-ACP qui maintient une relation privilégiée avec la Côte d’Ivoire.

Si aujourd’hui au sein de l’Union européenne, la Belgique est le deuxième investisseur en Côte d’Ivoire et le deuxième pays de destination des produits ivoiriens, c’est bien qu’au-delà de l’amitié sincère entre nos deux peuples, nous avons également de multiples intérêts partagés.

La diplomatie économique est aujourd’hui essentielle dans la vie entre nations. Comment évaluez-vous sa tenue ici en Côte d’Ivoire ?

C’est incontestablement ma première
mission, en étroite collaboration avec le conseiller économique régional Guillaume de Bassompierre. Il s’agit d’accompagner nos investisseurs, d’ouvrir des portes en les mettant en contact avec les autorités ivoiriennes et relayer les besoins de la Côte d’Ivoire. Nous avons bénéficié d’une forte accélération des relations économiques suite à la mission économique conduite par S.A.R. la Princesse Astrid en 2017. Plusieurs sociétés comme CMI/John Cockerill, ou Denys se sont installées dans le sillage de cette visite, alors que d’autres comme Tractebel ou Sea Invest ont encore renforcé leur présence.

Quels sont, à vos yeux les atouts majeurs des entreprises belges et luxembourgeoises en Côte d’Ivoire ?

Nous avons plusieurs atouts : une proximité linguistique avec la Côte d’Ivoire et des entreprises tournées vers l’Afrique, notamment dans des secteurs porteurs comme l’eau, le secteur portuaire, logistique et du transport, l’agriculture et la construction. Ajoutez à cela des entreprises qui sont à l’écoute des besoins de la Côte d’Ivoire.

En ce qui concerne la Belgique, soulignons également des instruments financiers flexibles et particulièrement appréciés par nos entreprises et leurs partenaires comme ceux de Credendo ou Finexpo. Enfin, la Belgique est au cœur de l’Europe qui reste sans conteste le premier partenaire économique de la Côte d’Ivoire.

Sur le plan plus politique et socio-économique, quelle est votre impression de l’actualité que traverse la Côte d’Ivoire ?

L’année 2020 marquée par la pandémie du COVID-19 a été difficile pour tous les pays dans le monde. On peut dire que sur ce plan le pays s’en est assez bien sorti, puisque le nombre d’infections a été contenu et que malgré l’impact économique et social réel de cette crise, le pays a quand même pu atteindre une croissance de près de 2%.

Cette année a été aussi marquée par des élections présidentielles et certaines violences, notamment pour contester ou entraver le scrutin. On doit faire le constat que si d’importantes avancées ont été réalisées ces dernières années sur le plan de la stabilité, il y a encore un travail à réaliser sur le plan de la réconciliation nationale. Je tiens dans ce contexte à saluer la rencontre initiée par le Président Ouattara avec l’ancien Président Bédié, car c’est par le dialogue et une reconnaissance mutuelle qu’on y parviendra.
Avec nos partenaires européens, c’est le message que nous passons en permanence, en soulignant l’importance de la stabilité et de l’état de droit pour le pays, mais également pour la pérennité des investissements étrangers.

La coopération au développement au sens classique du terme a pris fin il y a 15 ans. Y a-t-il d’autres formes de coopération entre nos pays ?

Je tiens d’abord à rappeler la contribution importante de la coopération belge au cours des premières décennies après
l’indépendance.
De nombreux ivoiriens ont aussi bénéficié de bourses d’études pour parfaire leur formation académique, notamment dans le domaine de l’agronomie et des sciences vétérinaires. Désormais, la Côte d’Ivoire a franchi plusieurs étapes majeures dans le développement et notre action se concentre sur les enjeux de durabilité et de soutien au développement d’un secteur privé responsable dans le pays.

Prenons par exemple le secteur du cacao. La Belgique est réputée mondialement pour son chocolat, alors que la Côte d’Ivoire est plus gros exportateur mondial de cacao. Dans le cadre du programme « Beyond Chocolate » tous les acteurs du chocolat belge (notamment les producteurs de chocolat, la grande distribution, les ONG, les universités et le gouvernement) se sont engagés sur des objectifs concrets pour contribuer à ce que durant la prochaine décennie, tout le chocolat belge qui sera produit se fera sans contribuer au déboisement et en garantissant un revenu juste au planteur. L’objectif est clair : tout le monde doit profiter du chocolat belge, du producteur au consommateur. Nous accompagnons cette démarche sur le terrain par des projets multi-acteurs. L’agence de développement belge Enabel assure également la formation de coopératives en vue d’une professionnalisation et d’une approche plus durable et équitable.

Le soutien au développement du secteur privé passe aussi par la présence du premier bureau de notre banque de développement, BIO-Invest, en Afrique ici à Abidjan. Le financement d’investissements par le secteur privé sur le terrain contribue ainsi au développement du pays.

Que diriez-vous à nos entreprises pour l’année et celles qui suivront ?

J’encourage toutes nos entreprises à venir explorer le marché en Côte d’Ivoire. L’année 2021 s’annonce prometteuse en termes d’opportunités dans le pays. L’ambassade et le bureau économique sont à votre entière disposition. Dans cette démarche, les Chambres de Commerce CBL-ACP et BELUCI en Côte d’Ivoire sont également des partenaires irremplaçables.