Une résilience éprouvée. Voilà ce qui pourrait résumer le secret de la longévité de TEXAF. Née dans le coton en 1925, l’entreprise belge cotée dont la totalité des activités se trouvent en RDC, a su traverser les turbulences qui ont émaillé l’histoire politique, économique et sociale du pays. Faisant d’elle, aujourd’hui, un acteur de premier plan dans un environnement en constante mutation.
Aux origines de cette histoire à succès : un pari audacieux. Celui de construire la plus grande usine textile d’Afrique « UTEXLEO ». TEXAF est ainsi constituée le 14 août 1925 sous l’impulsion de Valère Lecluse, accompagné des frères Henri et Victor Lagache alors détenteurs d’entreprises textiles en Belgique, en Pologne et en Amérique du Sud. Ils s’associèrent ensuite à Joseph Rhodius, un entrepreneur installé à Léopoldville quatorze ans plus tôt.
Les Pouvoirs Publics ayant accordé un terrain de près de 60 hectares à Kinshasa, le long du fleuve Congo, pour la concrétisation de ce projet ambitieux, les membres fondateurs s’empressèrent de mobiliser toutes les énergies autour de ce dessein hors du commun. Le 28 juin 1928, c’est avec apparat que l’usine est officiellement inaugurée par un invité de marque. Le Roi Albert I de Belgique met alors en route les machines de la « salle de battage » où débute le processus de transformation du coton congolais en fil.
D’emblée, le vaste site industriel, dominant la baie de Ngaliema, impressionne. Tant il comprend de multiples ateliers de filature, de tissage, d’impression et de teinture logés dans d’immenses entrepôts. Mais aussi parce que ses dirigeants ont su galvaniser l’énergie de ceux qu’on appelait encore à l’époque « les indigènes ». Certains y voyaient un exploit bien qu’ils se gardaient de pronostiquer sur la viabilité d’un tel projet. D’autres défendaient le manifeste des fondateurs : « vêtir les autochtones avec des tissus de leur goût, fabriqués par eux-mêmes, à l’aide de coton qu’ils planteraient et récolteraient eux-mêmes ».
L’entreprise coloniale se distinguait par sa soif inextinguible de développer une activité fructueuse qui allait de pair avec sa volonté d’en faire profiter ses collaborateurs locaux.
En témoignent diverses initiatives telles que la mise en place de navettes pour le déplacement de ses employés de et vers leur village ou encore la mise en place d’un programme médical à destination de ses ouvriers, dont une maternité située à Kitambo. La société est également à l’initiative des premières installations de la REGIDESO et de la SNEL à Kinshasa, encore opérationnelles aujourd’hui.
À son apogée, l’entreprise ne compte pas moins de 6.000 collaborateurs à Kinshasa. Ce qui en faisait le plus important employeur privé de la ville. Elle encadrait également plus de 100.000 paysans dans la filière coton, répartis sur plusieurs provinces du centre et de l’Est du pays. Grâce à ses effectifs, toute la chaîne de transformation était maîtrisée, de la graine à la vente de tissus au détail.
Au sein d’UTEXLEO, devenu UTEXCO, puis UTEXAFRICA, la production annuelle s’est élevée à plus de 30 millions de mètres de tissus.
L’adversité, une opportunité
Après plus de 60 ans d’alternance de périodes fastes et parfois plus difficiles, le groupe TEXAF a été secoué par les importantes crises et les troubles qui ont plongé le Congo dans un marasme financier après les pillages de 1991 et de 1993, au cours desquels deux de ses cadres ont perdu la vie, ont profondément impacté l’activité économique du pays. La dégradation des voies de transports terrestres et ferroviaires rend les échanges avec l’intérieur du pays très difficiles. L’instabilité politique, les conflits armés, un système bancaire défaillant et la contrebande à grande échelle sur les copies de produits conçus par UTEXAFRICA fragilisent fortement l’activité textile du groupe. Celle-ci ne tient plus qu’à un fil début 2000.
Pour lui éviter un destin funeste, après un management by out organisé en 2002 par Philippe Croonenberghs et une tentative avortée de partenariat avec un autre groupe textile actif en Afrique subsaharienne, le groupe opère un virage à 180 degrés en décidant d’affecter ses actifs fonciers à un impressionnant développement immobilier. Débute alors une série de projets de construction sur ce site exceptionnel, qui accueille aujourd’hui près de 300 logements haut de gamme qui font la renommée de la « concession UTEXAFRICA ». Le complexe s’inscrit comme la référence en matière de location résidentielle et l’endroit le plus prisé par les cadres et fonctionnaires internationaux en quête de quiétude dans le bouillonnant centre-ville de Kinshasa.
Bordé par le majestueux fleuve Congo, le domaine propose de très nombreux espaces verts, divers parcours de promenades, des terrains de sport, une piscine ainsi qu’un bar-restaurant. Ce sont récemment ajoutés à ces équipements, deux nouvelles salles de fitness et de cours collectifs ainsi qu’une nouvelle plaine de jeux pour enfants.
La communauté UTEXAFRICA compte actuellement près de 1.000 personnes de 35 nationalités différentes logées dans 300 résidences. Et la société n’entend pas s’arrêter là, disposant encore d’espaces importants disponibles pour ses futurs projets.
Le groupe investit de manière continue et régulière dans l’accroissement et l’embellissement de son parc. Il construit la deuxième phase de 33 appartements de son projet « Bois Nobles » et un nouvel immeuble de 3.000 m2 de bureaux « Petit Pont ». Ce dernier est le premier bâtiment éco-responsable de la ville de Kinshasa.
Un caméléon noir jaune rouge
Au cours de son histoire, TEXAF a également diversifié ses activités dans les domaines de la construction métallique, l’exploitation d’une carrière de grès et l’agriculture.
Anticiper, oser, se réinventer, … Fort de son parcours truffé, certes, de vicissitudes, l’entreprise belge place la créativité et l’innovation au cœur de son modèle de croissance.
Il y a à peine un an, elle annonçait se lancer dans l‘aventure numérique, convaincue des perspectives et des opportunités offertes par cette 4e révolution industrielle. Elle a immédiatement débuté la construction d’un premier hub digital qui est opérationnel depuis janvier 2020 et qui apparaît déjà comme un espace incontournable de l’écosystème tech de la ville.
Quant aux valeurs sociétales promues par les membres fondateurs du groupe, ses dirigeants actuels souhaitent les encourager et les développer. TEXAF soutient ainsi financièrement plusieurs projets de développement en RDC dans les domaines de la santé, de l’éducation et de la prise en charge des personnes les plus vulnérables. Il promeut également les activités de l’espace éducatif et culturel TEXAF BILEMBO, crée en 2014 dans une ancienne partie préservée de l’usine. Si l’espace culturel est le rendez-vous privilégié des amoureux de l’art contemporain sous toutes ses formes, il se veut aussi être un lieu d’éducation et d’ouverture au monde pour les enfants des écoles de Kinshasa qui, dans leur grande majorité, n’ont jamais l’opportunité de quitter leur salle de classe à la découverte guidée de leur ville et de leur pays.